Prévost journaliste se souvenait volontiers qu’il était aussi romancier. Les récits brefs qu’il multiplie dans ses périodiques se limitent quelquefois à un copieux paragraphe et amorcent ailleurs, au long de quelque cinq ou six numéros, de petits feuilletons. Dispersés au hasard d’une copie abondante et souvent pressée, ils paraissaient, dès la seconde moitié du XVIIIe siècle, assez remarquables pour faire l’objet de plusieurs éditions séparées: les premiers lecteurs ont dû y reconnaître comme un condensé du génie de Prévost romancier.
La critique prévostienne, pourtant, n’avait jamais vraiment fait un sort à cet ensemble disparate, dont le présent recueil propose une première prospection systématique. Les récits brefs de Prévost, du coup, se profilent, aux lisières du romanesque et du journalistique, comme un véritable laboratoire poétologique aménagé par un virtuose de la réécriture; ils consonent aussi bien avec ses préoccupations éclairées qu’avec ses angoisses les plus profondes, où bon nombre des études ici rassemblées engagent à découvrir certain envers obscur des Lumières.