Voici une édition qui contribuera sans doute à éclairer une activité encore mal connue de Voltaire, celle d’éditeur. Car de cette œuvre composite qu’est le Discours de l’empereur Julien Voltaire se veut avant tout et reste bien l’organisateur, empruntant à l’empereur du IVe siècle le réquisitoire qu’il a dressé dans son Contre les Galiléens et au marquis d’Argens, son moderne et premier traducteur, la ‘belle infidèle’ qu’il a donnée à lire cinq ans plus tôt à ceux qui n’entendaient ni le grec ni le latin. Voltaire n’a cependant conservé le joyau que pour le servir dans une monture toute nouvelle: d’Argens avait accompagné sa traduction d’une substantielle préface et d’une annotation abondante; mais Voltaire a écarté la première et retenu un tiers seulement de la seconde, encadrant désormais le Discours de ses propres textes; en préfaces un ‘Avis au lecteur’ suivi d’un ‘Portrait de l’empereur Julien’ et d’un ‘Examen du Discours’; en postface un virulent ‘Supplément au Discours’. A quoi l’on ajoutera les quarante-quatre notes rédigées par l’éditeur et qui s’adjoignent aux treize notes de d’Argens qu’il a conservées; ce sont les ‘nouvelles notes de divers auteurs’ annoncés par la page de titre et dont quatre sont signées Damilaville, Boulanger, Bolingbroke et ‘le théologien Théro’: sous ces noms d’emprunt, l’éditeur ne s’est pas fait scrupule de réutiliser certains de ses textes antérieurs, pas plus qu’il n’a craint, par de simples coupes habilement opérées dans certaines notes de d’Argens, de défigurer à l’occasion la pensée du marquis quand elle se trouve contraire à la sienne. Ainsi voit-on éclairer sous ses différents aspects une activité éditoriale dont il fallait aussi pénétrer les motifs.