Après la ‘crise de conscience européenne’ (1680-1715), la question de l’idéal pédagogique révèle les transformations de la société française dont elle est aussi un acteur. Les besoins de la société, les forces religieuses, l’évolution de la pensée scientifique s’y croisent pour un mouvement d’accommodation qui fait toute la richesse de la pensée du dix-huitième siècle. C’est l’objet de cet ouvrage que de chercher a montrer ce mouvement et cette richesse de la pensée pédagogique sous Louis XV et Louis XVI (avant la Révolution), alors que la formation des enfants se trouve être le lieu de convergence de quelques grandes questions que dut affronter la monarchie: la place des ‘arts utiles’, des ‘métiers mécaniques’ dans la société, le rôle de l’Eglise dans la vie du royaume, l’intégration de démarches intellectuelles nouvelles, qui provoquent des conflits avec la pensée chrétienne et qui remettent en cause les sources de la pédagogie, la philosophie de l’entendement et donc des savoirs, connaissances et qualités souhaitées chez les enfants et jeunes gens du peuple et des élites.
Pour réaliser ce travail, nous nous sommes appuyés sur la très abondante littérature pédagogique du siècle tout en suivant la réalité du débat pédagogique dans quelques journaux pour en saisir le mouvement et les nombreuses implications. La production générale d’écrits sur l’éducation est proliférante; nous avons retenu ceux qui posaient la question éducative, dans l’axe de notre sujet, en veillant à ce que les genres littéraires soient variés comme l’exigeait le thème de notre étude. Le lecteur trouvera dans cet ouvrage la littérature pédagogique du siècle, même peut connue, en particulier celle des obscurs praticiens des écoles, des collèges et des maisons d’éducation qui ont beaucoup écrit. D’autre part, les questions pédagogiques passionnaient les Français, elles sont régulièrement traitées dans Le Mercure de France, le Journal de Verdun, et les Affiches de province.
Le plan suivi est chronologique pour mettre en relief les changements opères au cours du siècle, selon l’importance accordee – ou non – aux sources chrétiennes de l’éducation, la sévère mise en cause des collèges accuses de pratiques ‘gothiques’, l’introduction des modèles nouveaux de la science fondes sur l’observation et l’expérience, l’évolution de la philosophie de la connaissance, selon aussi la pression de la société civile exigeante en ce qui concerne le bonheur, la morale, l’utilité publique de l’éducation pour les besoins de la nation.