Grande voix à la fois solitaire, indépendante, libre, et solidaire de ceux et celles qui savaient partager les complexités et les simplicités de sa vision, celle de Jean Giono nous a donné quelques-uns des chefs-d’œuvre de notre modernité : Colline (1929), Que ma joie demeure (1935), Un roi sans divertissement (1947), Le hussard sur le toit (1951). Œuvre qui ne cesse de se renouveler – « il faut lire tout Giono, dit Pierre Citron, comme il faut lire tout Balzac » pour en saisir la secrète et émouvante continuité –, celle de Giono n’est plus platement divisible en une manière pseudo-stendhalienne et une autre, qui la précéderait, idyllique, rustique. L’étude de Colette Trout et Derk Visser explore, avec clarté et sensibilité, à la fois la diversité, les multiplicités, thématiques et stylistiques, de l’œuvre de Giono, et cette unité, « profonde et ténébreuse », sans doute, mais lumineuse également, qui énergise lyrisme et ironie, extase et souffrance, toutes les ambiguïtés et mouvantes complexités de l’humain. Ce sont la conscience et la vigoureuse, singulière et élégante narration de ces tensions qui fondent cette inimitable originalité que cherche à creuser la présente étude.