Depuis son apparition, le roman n'a cesse de se metamorphoser. Aux romans bretons de Chretien succedent des textes novateurs comme Ysaye le Triste, au debut du XVe siecle. Les romans de la Renaissance se degagent de la question du vrai et du faux et annoncent deja la poetique pre-moderne (Merlin, Baldus, Les Angoysses douloureuses, Alector, Heptameron). De J.-P. Camus a l'abbe Faydit, s'installe l'idee de l'antinomie religion-roman; d'autres questions centrent la reflexion sur le roman au XVIIe siecle et ses mises en pratique : l'ambition d'exemplarite (les Scudery), l'accommodement des styles aux personnages (Sorel). Aux prises avec un epuisement du genre, le XVIIIe siecle invente des solutions : la fusion des nouvelles dans l'encadrement de la structure (Challe), le brouillage de formes et contenus (Voltaire), l'inflexion empirique (Diderot, Laclos), le besoin de faire sentir les passions (cercle d'Epinay). Au XIXe siecle, le roman cherche a raconter le moi veritable plutot qu'une histoire (Senancour, Chateaubriand), privilegie le monologue interieur (Stendhal) ou, encore, tente d'illustrer le rapport de la feminite et de l'autobiographie (Sand).
Modification du roman, modification de la representation : le sujet observateur se trouve bouleverse (Hugo) et l'intrigue devalorisee au profit du milieu (Zola). Le XXe siecle, enfin, offre des voies difficiles a unifier : caractere classique et novateur a la fois du projet proustien, memoire historique provocatrice, equilibre entre les experiences intimes et le tissage rythmique de la parole (Giono, Butor), imbrication d'ecriture et feminisme (A. Ernaux), influence du fait divers (Besson, Jonquet), symbiose vivante des cultures (Cheng), paradoxe, enfin, de vouloir cerner des mouvements contestataires comme mai 68.