Ce travail etudie la maniere dont la catastrophe du nazisme et de la Shoah se repercute dans la memoire et la conscience identitaires de deux auteurs juifs qui, adultes au moment de la deuxieme guerre mondiale, n'ont pas connu la deportation. Albert Cohen (1895-1981) et Elias Canetti (1905-1994) sont confrontes a un meme probleme identitaire: celui de se definir comme Juifs et participer a la memoire collective juive, sans pouvoir s'appuyer directement ni sur la foi ni sur une experience personnelle traumatisante. Il y a chez les deux auteurs une volonte d'appropriation ou de reappropriation du passe qui se confond avec le projet d'ecriture, et qui participe tout a la fois de la recherche identitaire et de la meditation sur le sens et la portee de l'histoire recente. L'analyse des mecanismes de pouvoir, le combat contre la mort, la mise au jour de l'instinct de survie constituent les grands axes d'une reflexion commune sur l'histoire, qui trouve dans un certain ideal de la judeite sa mere nourriciere.