Les jésuites, contrairement au clergé séculier, se tinrent pendant tout
le dix-neuvième siècle en général loin du mouvement flamand: ce ne fut
qu’à la veille de la Première Guerre mondiale que naquit un courant
flamingant au sein de la Compagnie de Jésus. Ce courant, qui profita de
la situation politique en Belgique et atteignit son apogée dans les
années 1920 et 1930, visa avant tout la néerlandisation de la vie
jésuite en Flandre.
Mais plutôt que de mener leur combat dans les limites de leurs
communautés et de leurs collèges, les jésuites flamingants l’étendirent
à la société flamande tout entière.
Dès avant 1914, quelques membres de la Compagnie œuvrèrent à la
constitution d’une idéologie catholique du flamingantisme. Cette
idéologie présentait la lutte en faveur de la langue, de la culture et
de la nation flamandes comme faisant partie d’une autre lutte: celle
pour la sauvegarde de la foi catholique en Flandre.
Les jésuites flamingants en vinrent finalement à lier si étroitement le
catholicisme au nationalisme, que leurs adversaires leur reprochèrent de
faire passer le politique avant le religieux, à la manière de Charles
Maurras et de son mouvement d’Action française. Tel ne fut pas le cas:
leur objectif premier était bien de restituer la Flandre au Christ. Il
n’en est pas moins vrai que cet objectif dont l’accomplissement, à leur
avis, nécessitait la disparition de l’État belge, les poussa ipso facto
à l’activité politique, activité politique qu’ils menèrent
principalement par la voie des fidèles. Ceux-ci, avance la conclusion de
cette étude, en furent rapprochés du national-socialisme, de la
collaboration et de la sécularisation.